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Art Contemporain

 

Celle qui massait ses enjoliveurs avec de l’huile d’olive

 

 

 

 Je trouve qu’être prof d’art c’est quelque chose de difficile qui nécessite de porter une attention particulière à ses élèves, de la même manière qu’un médecin a un devoir d’intérêt vis a vis de ses patients,  puisque la moindre de ses négligence peut leur être fatale. C’est pareil pour un prof d’art qui se doit tout en se préservant sur le plan personnel, de savoir accueillir le travail d’un l’élève, tant parfois celui a surinvesti dans celui ci. Puisqu’il a chez l’artiste une urgence viscérale à créer et a être reconnu comme créateur. Une urgence qui peut vous rendre malade.

C’est avec beaucoup de fébrilité que ce travail intense a été présenté, si je ne lui avais pas tâté le front j’aurais pu dire qu’elle avait la fièvre.

Elle m’avait dit qu’elle avait choisi de travailler sur le sexe, c’était son sujet le sexe.

Elle nous a montré deux vidéos composées de sampling d’images et de sons récupérés  sur internet.  De l’art recyclé bien de son époque.

D’abord le sexe comme un voyage, ou on prends l’avion et on y  va a fond puisqu’on monte dans le cockpit. Le temps est suspendu, on est dans une dimension qui est de l’ordre de l’intime et de l’infiniment grand. On ne peut plus se regarder être, avoir conscience de soi, on est happé dans cet univers comme si on passait par le hublot. Nous voila au dessus d’une ville qui se déploie comme un éventail. Los Angeles, je crois me souvenir. Une ville qui d’abord se mélange avec un corps qu’il soit homme ou femme importe peu, les voitures en y passant lui caressent le dos, le plaisir suit les méridiens d’acupuncture, ou l’image suggestive renvoie sans cesse à une sensualité minérale plus qu’ organique, avec des préliminaires dilués dans l’espace du corps et celui de la ville et puis une recherche constante dans le rythme et l’intensité  du point  culminant qui mène à l’orgasme. Une mécanique parfaitement orchestrée ou même les bagnoles et les lampadaires jouissent en bramant.

Voilà elle nous a montré comment on baise avec la ville, baise avec le béton, baise avec le macadam, baise avec les cabines téléphoniques et le manche à balai du pilote.

La lumière se rallume, puis disposés dans le fond de la salle derrière le dos des spectateurs, godemichets en résine de toutes les tailles chacun contenant un poisson figé dans la résine,  forment une petite foret de symboles phalliques sur un vieux bout de tissus ou une feuille de papier. A mi chemin entre le stalagmite et l’esquimau en forme de fusée , un œil de poisson mort me nargue au travers de la résine.

«  le bonheur est grand dans l’étang de la jeune fille ou bondit le poisson vainqueur. »

Sauf que là il est mort.

 Je me demande si ces objets sont gluants, on s’attendrait a ce qu’ils dégoulinent de sperme, mais non c’est juste du jus de poisson pourri qui suinte.

C’est une drôle de chose d’imaginer un poisson dans un vagin, en prenant a la lettre les métaphores de la poésie chinoise du 10eme siècle, mais de fabriquer des objets qui matérialisent l’espace intérieur d’un vagin avec un poisson mort, ramène a des choses plus tragiques comme la frigidité ou le sida. La notion de plaisir et de mort sont entremêlée de façon cruelle avec un petit rappel humoristiques des odeurs corporelles féminines, et un brin de voyeurisme avec cet œil de poisson qui tel l’œil du gynéco te scruterait à l’intérieur.

On appelle l’amour la petite mort, mais ici avec ces objets a mi chemin entre la matière inerte et le vivant comme capturé et asphyxié , la petite mort source de tant de plaisir ne s’applique pas, noyée par le côté morbide du cadavre d’animal. Seul subsiste le souvenir de ce truc qui un moment a bien du frétiller et de l’associer à l’image du sexe féminin par nature accueillant.

Deuxième vidéo, elle nous prévient que certaines images vont choquer que ce n’est pas celle là qu’elle voulait montrer mais que, bon.

En fait je me rappelle d’un petit module représentant deux fesses bien rebondies d’un côté et une vulve glabre de l’autre.

La matière de cet objet virtuel qui comme une pièce de lego est censée représenter une partie du corps, ressemble a du latex ou du caoutchouc, la matière avec la quelle on fabrique les substituts sexuels.

Apres avoir tourné un peu autour du pot quelque chose qui ressemble à un doigt s’introduit dans la vulve et la branle, une matière qui ressemble a de la vaseline émerge de cette vulve.

 

 Cette deuxième vidéo pose la question de la frontière en art et pornographie, mais c’est une fausse question parce qu’on peut aussi faire de l’art avec la pornographie.

Ce qui est intéressant dans l’ensemble de ce travail c’est d’essayer d’aller le plus loin possible dans une évocation de la sexualité avec des objets désincarnés.

Ce qui pose la question de la vie des objets, voire de leur âme.

Décider de parler du sexe en évacuant totalement le facteur humain est une façon de mettre en évidence la mécanique des corps, histoire de se rappeler que les hormones sont responsables directement de nos sentiments et finalement de nos actes.

L’acte sexuel y est toujours abordé de l’intérieur, quand on fait l’amour a partir de quel moment l’autre existe t’il encore en tant que personne ?

L’autre devient sa bite, ses nichons, son cul. Son prénom n’a aucune importance.

Sommes nous encore et toujours dans une forme de solitude même en pénétrant au cœur de l’intimité de l’autre?.

Trouver la sensualité dans un rétroviseur, avec un god, avec soi même, alors quelle importance tant que quelque chose nourrit le plaisir ?

Tant qu’à apprécier le sexe pour le sexe on peut trouver des tonnes de substituts à l’homme et a la femme.  Tout ceci nous ouvre bien des champs dans un monde ou le plaisir se consomme avec et comme un objet.

C’est ce que au fond nous renvoie cette vision de la société occidentale que véhicule  cette histoire qui se passe à Los Angeles.

 

Elle a remballé ses affaires en pestant parce que ses gods puaient le poisson pourri, elle a dit qu’elle voulait être aussi curator, pour ne plus être toute seule, travailler avec les autres, mais bon, c’est aussi ça le problème d’être artiste dans le sens fort du terme.

On est tout seul .